Je ne rechigne pas devant grand-chose. Mais il y a bien une tâche que je ne fais pas, à la maison : c’est nettoyer les vitres. Pas que j’ai peur de monter sur un tabouret ou que je manque d’huile de coude. Non.
Mais le constat est là : les vitres sont plus moches après mon passage qu’avant. Quand les fenêtres sont sales, elles sont sales partout. Une belle saleté uniforme. Une jolie crasse parfaitement répartie. Mais quand j’ai fini de frotter, cette uniformité a disparu et mes vitres ressemblent à un patchwork. Des traces de coulées d’eau. Des marques de raclette. Des tâches de chiffon. C’est affreux. J’ai beau poser un regard d’expert sur le double vitrage et y regarder à deux fois, ce n’est jamais parfait. Selon l’angle de vue et la lumière, je m’aperçois que ce que je pensais propre ne l’est pas et je déniche toujours de nouvelles imperfections.
Plus je frotte, plus je désespère.
Bilan ? Je finis toujours de mauvaise humeur quand je fais les carreaux. C’est bien la seule activité nettoyage qui ne m’aide pas à me sentir mieux. Oui, laver les vitres, c’est tout un art. Habituellement, j’appelle une société qui fait les fenêtres de toute la maison une fois par an. En 30 min, le bonhomme nettoie tout et c’est nickel. Même les velux difficiles d’accès du grenier. Il bascule la fenêtre, balance la flotte savonnée, fait quelques coups de poignets et hop, c’est fini. Jamais une goutte par terre. Alors que moi, je dois mettre un torchon sous chaque fenêtre tellement ça dégouline tout partout.
Une affaire d’hommes ?
Je me souviens, quand j’étais petite, c’était mon père qui lavait les fenêtres à la maison. Il les frottait avec du papier journal après avoir pulvérisé du savon liquide et du vinaigre blanc sur les carreaux. Il était tellement méticuleux ! Le résultat était époustouflant. Les vitres étaient si translucides qu’on aurait pu passer à travers, pensant que les portes fenêtres étaient ouvertes. Enfin, ça, ça durait jusqu’à ce que le chat laisse des traces de coussinets sur la baie vitrée pour demander à sortir gambader.
Du coup, ici aussi, c’est l’homme qui s’y colle. Il est beaucoup plus grand déjà, et puis, il s’énerve moins vite que moi pour ce genre de choses. D’ailleurs, il est mignon à observer quand il joue les laveurs de vitres. Il sort un bout de la langue, comme les enfants quand ils s’appliquent à l’école. Les histoires d’amour sont intimement liées aux fenêtres, quand on y pense. Roméo grimpait aux balcons de Juliette ; l’homme escalade mes fenêtres. C’est tout pareil ! Il frotte un peu, beaucoup, passionnément. Pour plaire à sa dame de carreau.