J’aime l’idée même de la liberté. Et ça vaut aussi pour l’aménagement des maisons. Sauf que là, je suis tellement en colère que j’organiserais bien une manif avec tous mes copains nains de jardin. Je vous explique.
Un couple d’amis a décidé de refaire son jardin : au programme, haies artificielles et gazon synthétique. Leur terrain est sacrément grand. On peut sans difficulté parler d’un immense jardin. « C’est bien parce que c’est immense qu’on y pense, Mila ! Entretenir tout ça, c’est impossible » Ils nous ont expliqué que cela leur permettrait des économies d’eau, un entretien faible, et la promesse d’une longue durée de vie du gazon. Je fulminais. Evidemment, oui, il n’y a que les choses mortes, autrement dit sans vie, qui ne boivent pas et ne grandissent pas. Quel gâchis.
Bien sûr, c’est un peu barbant de tondre la pelouse !
On a à peine rangé la tondeuse, que ça se remet à pousser. Et dès le printemps, il faut s’y coller. Pas trop régulièrement, mais quand même. Et pendant ces 2 ou 3 semaines où on laisse l’herbe tranquille, des pâquerettes, pissenlits et autres boutons d’or mettent de la couleur ci et là. « La petite maison dans la prairie » et le bonheur des choses simples et vraies. Les oiseaux qui picorent la pelouse. Les escargots qui partent en voyage. Le chat qui mordille les touffes d’herbes. Le jardin, c’est un tableau vivant, animé, où il se passe chaque jour quelque chose, si on prend la peine d’observer.
Alors oui, c’est certain, c’est parfois ardu de faire pousser du gazon : l’homme s’essaye à l’exercice depuis peu et c’est compliqué. Le soir, il part ausculter les parcelles concernées. Mais que c’est gai quand il rentre tout content d’avoir repéré 3 brins d’herbe et demi, tout neufs ! Et puis, l’odeur de la pelouse fraîchement coupée est parmi mes préférées. Fini, tout ça, avec du plastique.
Toute une vie qui disparaît ?
J’ai bien compris que je passais carrément pour une débile quand j’ai parlé de Mimi la Fourmi, l’héroïne du film culte « Chérie, j’ai rétréci les gosses ». Mais après l’avoir vu, on ne peut plus jamais, ô grand jamais, se moquer du sort des fourmis. Qu’allait-il advenir de toute cette vie, discrète et silencieuse, bientôt étouffée sous un tapis de faux gazon ?
Un rendu « naturel »
Pour toute réponse, ils ont ajouté qu’ils cherchaient à ce que le rendu soit le plus « naturel » possible. Mais, que n’ont-ils pas compris dans le mot synthétique ? Quand bien même on leur proposerait des haies et une pelouse plus vrais que nature, ce serait quand même du fake. De l’illusion. Du pipeau.
Parfait et donc ennuyeux…
Vu qu’ils étaient insensibles à mes arguments du cœur, j’ai tenté de les raisonner de manière logique. Le gazon artificiel a comme inconvénient d’être un produit fabriqué. Ce qui implique donc qu’il n’a plus les imperfections du gazon naturel. Impossible, pour une machine, de donner à de la fibre synthétique et du plastique, les aspects naturels d’un vrai gazon imparfait, et donc charmant.
Franchement, pour aménager un terrain de tennis ou un salon d’exposition, pourquoi pas. Mais en qui concerne les jardins, les parcs, je trouve cela triste à mourir. En sirotant mon mojito, je leur ai lancé un sort très moche : j’espère qu’ils se brûleront les pieds sur leur faux gazon. Parce que oui, le plastique, au soleil, ça chauffe ! Bien fait !