« Je n’ai pas d’aménagement pour personnes non valides ici » : Roger donne d’emblée le ton de la visite ! Mais tout a néanmoins été pensé soigneusement en amont, dès l’achat du gros œuvre fermé…
Soutenu par Immovlan, Roger Habsch s’est prêté avec le sourire au jeu de la visite guidée de son loft situé au pied de Liège, dans le quartier du Laveu. L’accueil est d’ailleurs typiquement liégeois : chaleureux et cordial dès la première seconde ! Originaire de Verviers, Roger Habsch est venu s’installer « du bon côté de Liège pour éviter les embouteillages », dans un loft moderne dont le balcon offre une belle vue sur l’impressionnant toit de la gare des Guillemins. Un loft aménagé spécialement en raison de sa paralysie conséquente de son accident de voiture de 1997 ? « À part les traces de roues de ma chaise sur le sol, rien ne distingue mon loft d’un autre» lance Roger !
Le loft idéal
« Concrètement, je n’ai pas adapté grand-chose chez moi, c’est une habitation tout à fait traditionnelle. Je pars plutôt du principe que celui qui s’habitue à vivre avec des adaptations spécifiques perd ensuite tous ses points de repère une fois qu’il sort de chez lui. Et c’est ça qui est difficile ». Effectivement, comme Roger nous le montre en toute simplicité, toutes ses pièces de vie, depuis la cuisine jusqu’à la chambre à coucher en passant par la salle de bain s’avèrent conventionnelles.
L’ambiance générale est, en fait, parfaitement conforme à ce qu’on peut s’attendre du loft idéal : sol en béton lissé, hourdis apparents, mariage entre matériaux bruts (blocs de béton, poutrelles métalliques, etc.) et modernes (comme les carrelages brillants style Metro dans la salle de bain), etc.
Pas de lift !
Bien sûr, cette organisation est possible car Roger a pensé l’ergonomie de son loft dès la genèse du projet. « J’ai acheté un gros œuvre fermé, et donc j’ai pu aménager l’espace comme je le voulais. Ce qui est sûr, c’est que je ne voulais pas d’habitation avec un étage pour ne pas devoir dépendre d’un lift. J’ai des potes qui ont eu des soucis avec leur lift, qui tombe en panne ou qui reste bloqué pendant une panne de courant. Pour moi, il était hors de question d’avoir un lift» nous glisse Roger… tout en ajoutant directement en surprenant notre regard glisser derrière lui… « Bon, j’en ai quand même un ici, mais c’est un lift que j’utilise occasionnellement pour accéder à mon atelier à l’étage ».
Et puis, on comprend vite que Roger n’est pas du genre à rester coincé en haut en cas de panne de courant ! « De toute façon, j’ai ajouté un deuxième treuil manuel qui me permettrait de pouvoir continuer à utiliser mon monte-charge ou de descendre si je reste coincé ». Au passage, à l’étage, on remarque aussi le garde-corps soudé par Roger en personne. « Avant mon accident, j’étais maçon, plafonneur et carreleur. J’ai toujours été manuel, et je continue à bricoler un maximum tout seul ». Le plancher en OSB que Roger termine de poncer et vernir pour y aménager son atelier en témoigne d’ailleurs. « C’est un demi-étage, mais même avec le plafond à 1,60 m, je passe facilement avec ma chaise donc pour moi c’est parfait » annonce Roger avec sa même bonne humeur !
Et le fait d’avoir choisir un loft situé au premier étage, cela ne pose pas de problème d’accès ? « Je ne voulais pas des lofts situés au rez-de-chaussée car je ne les trouvais pas assez lumineux. Par contre, ceux situés au deuxième étage n’étaient accessibles que par l’ascenseur. Ici au premier, en plus de l’ascenseur, en cas de problème, je peux aussi utiliser la rampe du garage depuis le bout du couloir pour sortir tout seul. »
« Trophée » dans le salon
Visiblement, Roger a pensé à tout. Et aussi à s’aménager un espace d’entrainement dans son loft ? On ne décroche certainement pas deux médailles de bronze aux jeux paralympique sans un entrainement quotidien ! « Non, car à la base, ce n’était pas du tout le but. J’ai acheté le loft en 2007, mais à cette époque je faisais seulement un peu de sport comme du basket ou de la natation pour avoir une bonne hygiène de vie et garder une certaine condition physique. Puis j’ai eu mon premier vélo, un vélo couché où on pédale avec les mains. Là, je me suis lancé dedans à fond, jusqu’à avoir le statut d’espoir international. Puis j’ai changé de discipline en 2017 pour me consacrer complétement à la chaise dès 2018 ».
Donc bien après l’aménagement du loft si je comprends bien ? « Oui, c’est d’ailleurs pour ça que la chaise est en plein milieu du salon sur les rouleaux » s’amuse Roger. Cela dit, comme c’est celle qui a aidé Roger à décrocher deux médailles de bronze aux Jeux de Tokyo en 2021 (malgré un odieux sabotage et une crevaison lente…), on a connu pire comme trophée trônant au milieu d’un salon, non ?
Allez, il est temps de laisser Roger, mais non sans lui demander ses ambitions pour Paris 2024 : « ben, on va aller chercher l’or hein » déclare alors spontanément ce champion décidemment tout en simplicité. Et ce seulement quelques jours, d’ailleurs, avant de s’offrir un nouveau record de Belgique sur 60 mètres pour conclure l’année 2022 en beauté…