Mon voisin a récupéré une soixantaine de tuiles sur le chantier de sa fille : des tuiles « chapeaux ». Très longues, très recourbées et d’un bel orange doux. J’adore quand il bricole : il est si minutieux et inventif.
Il a délimité un cercle sur la pelouse et il a entrepris de creuser. Il a bien dû ôter une dizaine de centimètres de terre : une profondeur suffisante pour coincer les tuiles. Il a disposé une première rangée de tuiles chapeaux à la verticale, le long du bord creusé dans l’herbe. Leur face creuse était tournée vers le ciel. Il ne les a pas trop serrées : il fallait laisser un espace entre chacune d’elles.
Il s’est ensuite évertué à mettre la deuxième rangée de tuiles : dans l’autre sens, cette fois. C’est-à-dire que les tuiles, posées avec le creux vers la terre, venaient se poser sur les premières tuiles déposées. Elles n’avaient jamais aussi bien porté leur nom : des chapeaux pour recouvrir la première rangée.
Les tuiles du dessous et du dessus, mises les unes sur les autres, formaient comme une guirlande dure. Une ondulation circulaire qui m’a fait penser à un coquillage. Comme une grande coquille Saint-Jacques.
Pour vous dire, j’ai carrément pensé au tableau La Naissance de Vénus de Botticelli : même proportion, même vague, même couleur. Chance pour moi, il n’avait pas l’intention de poser nu sur un monticule de terre. Il est féru d’histoire de l’art, lui aussi : on a bien ri.
Il a mis du terreau dans l’espace intérieur et a ainsi recouvert le bas des tuiles : elles ont eu l’air plus courtes tout à coup. Il a ensuite planté des fleurs dans cet immense pot de terre cuite, construit à même le sol.
Comme toujours, je l’ai taquiné en lui disant que, maintenant que c’était fini chez lui, il pouvait venir travailler chez moi : il réussit tout ce qu’il entreprend.
Moi, je garde l’idée ! Une autre fois, peut-être… Les tuiles, ça me connait !